Entre promesses de développement économique et préoccupations environnementales, l’extraction minière en Afrique cristallise des enjeux géopolitiques, sociaux et économiques majeurs à l’heure de la transition énergétique mondiale.
L’extraction au cœur des ambitions énergétiques mondiales
L’Afrique est aujourd’hui au centre d’une compétition mondiale pour ses ressources minières, indispensables à la transition énergétique. Cobalt en République démocratique du Congo, lithium au Zimbabwe, cuivre en Zambie ou terres rares au Burundi : ces métaux critiques sont essentiels à la fabrication de batteries, d’éoliennes et de panneaux solaires. Face à une demande en forte hausse, l’extraction s’intensifie à un rythme inédit, souvent sous l’impulsion d’acteurs étrangers, notamment chinois, européens et américains.
Pour les gouvernements africains, ces ressources représentent un levier de croissance. Selon la Banque Mondiale, le secteur extractif contribue à plus de 10 % du PIB de nombreux pays du continent. Pourtant, cette manne reste mal répartie. Les revenus issus de l’extraction profitent souvent à une élite politique ou à des compagnies multinationales, tandis que les communautés locales en subissent les externalités : déplacements forcés, pollution des sols et des eaux, et précarité sociale persistante.
Des impacts sociaux et environnementaux grandissants
L’essor de l’extraction minière en Afrique soulève des préoccupations majeures en matière de durabilité. À Kolwezi, en RDC, les mines de cobalt sont devenues un symbole des dérives du secteur : conditions de travail dangereuses, travail des enfants, exploitation artisanale non réglementée. Amnesty International et Human Rights Watch dénoncent régulièrement ces violations, appelant les gouvernements et les entreprises à davantage de transparence et de respect des droits humains.
Sur le plan environnemental, les conséquences sont tout aussi préoccupantes. La déforestation, la pollution des nappes phréatiques par les résidus toxiques, et la perte de biodiversité menacent des écosystèmes déjà fragiles. L’extraction illégale, très présente en Afrique de l’Ouest (Sierra Leone, Ghana, Mali), échappe à tout contrôle et accentue ces dégâts. Or, dans un contexte de dérèglement climatique, cette pression accrue sur les ressources naturelles pose la question de la compatibilité entre croissance minière et protection de l’environnement.
Vers une gouvernance plus équitable et durable ?
Face à ces défis, certains États africains cherchent à reprendre la main sur leur secteur minier. Le Code minier révisé de la RDC, adopté en 2018, impose une plus grande part des bénéfices aux autorités locales et une taxation accrue des entreprises. De même, la Namibie ou le Botswana mettent en place des politiques de valorisation locale, visant à transformer les minerais sur place pour créer de l’emploi et capter une plus grande part de la chaîne de valeur.
Les initiatives de traçabilité et de certification éthique, comme l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), prennent également de l’ampleur. Elles visent à garantir que les projets d’extraction soient menés de manière responsable, tant sur le plan humain qu’environnemental. Mais ces efforts demeurent limités face à la pression croissante du marché mondial, qui favorise souvent des pratiques extractivistes concentrés sur le court termes.
L’Afrique dispose d’un potentiel minier colossal, mais sa transformation en moteur de développement durable reste un pari incertain. La bataille autour de l’extraction ne se joue pas seulement dans les sous-sols, mais aussi dans les sphères de gouvernance, de justice sociale et de préservation de l’environnement