L’Organisation de coopération et de développement économiques table désormais sur une croissance de 3,2 % en 2025, contre 2,9 % lors de ses précédentes estimations. Mais derrière cette embellie, l’institution alerte sur les risques persistants liés à l’inflation, aux tensions commerciales et aux fragilités budgétaires.
Une révision à la hausse inattendue
L’économie mondiale se montre plus résistante que prévu face à la vague protectionniste. Dans ses nouvelles perspectives publiées mardi, l’OCDE a relevé sa prévision de croissance mondiale pour 2025 à 3,2 %, contre 2,9 % lors de ses estimations de juin. Une révision qui rapproche l’organisation de sa prévision de décembre 2024 (3,3 %), formulée avant le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche.
Pour 2026 en revanche, l’institution reste prudente : elle maintient son estimation à 2,9 %, bien en deçà du niveau habituel d’une économie en plein essor, que l’économiste en chef de l’OCDE, Alvaro Pereira, situe plutôt autour de 4 %.
Les États-Unis ralentissent, l’Europe progresse timidement
Si la croissance mondiale tient bon, c’est au prix de divergences marquées entre régions. Aux États-Unis, l’effet des droits de douane imposés par Donald Trump se fait déjà sentir. Après une progression du PIB de 2,8 % en 2024, la croissance retomberait à 1,8 % en 2025, puis 1,5 % en 2026.
La zone euro s’en sort légèrement mieux que prévu, avec une prévision révisée à la hausse de 1,2 % pour 2025, soit +0,2 point par rapport aux estimations de juin. Mais la dynamique devrait s’essouffler en 2026, avec une croissance ramenée à 1,0 %.
En Asie et en Amérique latine, les signaux sont plus mitigés. La Corée du Sud, l’Allemagne et le Brésil montrent déjà depuis août des signes de ralentissement de leur production, souligne le rapport. La Chine, moteur de l’économie mondiale, voit elle aussi sa consommation s’essouffler.
Des droits de douane à des niveaux historiques
Depuis son retour à la présidence américaine, Donald Trump a imposé des surtaxes à la plupart des partenaires commerciaux des États-Unis. Selon l’OCDE, le taux effectif moyen des droits de douane sur les importations atteint désormais 19,5 %, son plus haut niveau depuis 1933.
Jusqu’ici, l’impact a été partiellement absorbé par les entreprises, qui ont rogné sur leurs marges pour ne pas répercuter immédiatement la totalité des hausses sur les prix à la consommation. De plus, la mise en place progressive des nouvelles mesures douanières a retardé leurs effets les plus lourds.
Mais l’organisation prévient : ces amortisseurs ne dureront pas éternellement, et le choc pourrait se faire pleinement sentir dans les prochains trimestres.
Une inflation persistante
Autre sujet d’inquiétude : l’évolution des prix. « On anticipe une inflation un peu plus élevée, surtout aux États-Unis, mais pas seulement », a expliqué Alvaro Pereira, bientôt nommé gouverneur de la Banque du Portugal. La hausse des prix alimentaires en Japon ou en Afrique du Sud illustre la portée mondiale du phénomène.
Une inflation durable compliquerait le travail des banques centrales, déjà confrontées à des dettes publiques en hausse et à une remontée des taux d’emprunt.
Des risques toujours présents
Si la révision de croissance donne un peu d’air, l’OCDE insiste sur les nombreux risques qui pourraient rapidement inverser la tendance. Parmi eux :
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de nouvelles hausses de droits de douane, qui viendraient encore freiner le commerce mondial ;
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des fragilités budgétaires, avec des déficits et dettes qui continuent de se creuser dans la plupart des régions ;
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des tensions sur les marchés financiers, liées à l’endettement et à l’inflation.
« Généralement, quand l’économie se porte très bien, la croissance se situe autour de 4 %, donc nous en sommes loin », rappelle Alvaro Pereira.
Une embellie fragile
En somme, l’OCDE dessine le portrait d’une économie mondiale qui résiste mieux qu’attendu à la vague protectionniste et à l’incertitude, mais dont la solidité reste fragile. La légère amélioration de la prévision pour 2025 ne doit pas masquer les risques d’un essoufflement dès l’année suivante, ni la vulnérabilité persistante face aux politiques commerciales et monétaires.
L’économie mondiale a gagné un peu de temps, mais la tempête des droits de douane et des tensions inflationnistes pourrait bien n’avoir pas encore dit son dernier mot.